Le changement en entreprise : l’enjeu de la co-construction

Tout le monde semble s’accorder sur une chose : une entreprise qui ne change pas est une entreprise qui ne dure pas… Et cela semble encore plus vrai aujourd’hui, dans un monde où les innovations et surtout les nouveaux défis, qu’ils soient sociaux, économiques ou climatiques, naissent et s’enchaînent à une allure de plus en plus folle. Parce que le changement est vital, la compréhension de ses clés de réussite nous semble primordiale. Qu’est-ce qui fait d’un changement un succès ? Comment bien le mener ? Comment impliquer et embarquer les équipes ? Peut-il vraiment exister des méthodes ou des process clés, sur une question aussi intimement liée à la nature humaine ?

Le changement en entreprise est à l’œuvre, partout, tout le temps

En tant qu’agence conseil en communication nous en sommes témoins dans le cadre de nos missions. Missions lors desquelles nous partons toujours du même principe : la définition d’un projet d’entreprise clair et partagé est un pré-requis indispensable à l’ébauche de la moindre stratégie de communication ou d’innovation. 

Alors, le travail qui s’engage peut amener l’organisation à :

  • redéfinir sa raison d’être,
  • réaffirmer ses valeurs,
  • ou encore repenser ses manières de faire.

Une réflexion qui impacte inévitablement les collaborateurs : dans la vision de leur travail, le sens qu’ils y mettent, si ce n’est même dans leur manière d’opérer au quotidien.

Nos missions d’agence conseil en communication, menées dans des structures de tailles, de secteurs et aux modes de fonctionnement différents, nous ont permis d’observer le changement, sous différentes formes, se mettre en place au sein de l’entreprise. Avec des résultats qui ne sont pas les mêmes partout.

Au sein même de notre agence, qui compte désormais dix-sept collaborateurs, dont six associés, le changement s’invite très régulièrement à la table de nos échanges – ou, plutôt, est souvent déclenché par l’équipe, dans une optique d’amélioration continue. Cela nous permet d’expérimenter de nouvelles pratiques, d’innover en imaginant la mise en œuvre de solutions qui puissent intégrer toutes les parties prenantes concernées. Et, ici comme ailleurs, cela peut parfois se révéler moins facile que prévu, mais on y arrive toujours… 😉

Mais alors pourquoi changer, si c’est compliqué ?

Eh bien, ça ne vous aura sans doute pas échappé… le monde change !

Révolution numérique, dérèglement climatique, accroissement des inégalités et maintenant Coronavirus ou COVID 19… Oui, le monde change, c’est indéniable !

L’humanité est-elle sur le point d’entrer dans une nouvelle ère ? Toutes ces mutations, plus ou moins alarmantes, semblent en tout cas stimuler, chez nombre d’entre nous, l’envie de voir se construire un monde meilleur. Un monde dans lequel il faudra sans doute faire plus avec moins, faire mieux, plus durable, éthique, responsable… et, bien sûr, plus rapidement… 😉

Nouvelles attentes des consommateurs, des partenaires, des collaborateurs… Les challenges qui poussent les organisations à se remettre en question se multiplient. Les codes évoluent, et l’entreprise doit s’adapter. Adapter son management, préciser sa raison d’être, repenser son organisation, digitaliser ses process ou encore développer son offre pour ne pas se laisser distancer par une concurrence plus agile…

Parce que le monde change, les entreprises changent aussi. Dès lors, l’équation est simple : s’adapter ou mourrir.

Changer, d’accord… mais comment, et à quel prix ?

D’après l’étude « Le courage de transformer » publiée en 2019 par le cabinet EY et le CSA1, 67% des organisations publiques et privées déclarent avoir lancé un plan de transformation. Le changement est donc au cœur des préoccupations des dirigeants et de des entreprises qui ont bien compris que pour évoluer il fallait s’adapter. Et les collaborateurs dans tout ça ?

Leur a-t-on au moins expliqué le pourquoi du changement, avant d’entrer dans le comment, ou pire encore, directement dans le faire ?

Ce sont les chiffres qui le disent ! Selon une autre enquête, issue du cabinet Empreinte Humaine et de l’Ifop, si une majorité de salariés considèrent le changement légitime et nécessaire, ils sont peu nombreux, une fois qu’il est mis en place, à lui reconnaître un impact positif sur leur activité. Les mêmes déplorent un accompagnement et une consultation insuffisante.

Alors, mauvaise communication interne, manque de pédagogie ou problème de gouvernance ?

Ce qui est certain, c’est qu’une faible mobilisation des collaborateurs freine la réussite du changement.

Toutes ces questions nous trottent dans la tête, parce qu’elles touchent tant aux problématiques de nos clients qu’à notre manière de faire projet en équipe, en interne. Complexes, de par tout ce qu’elles impliquent de paramètres purement humains – et donc intrinsèquement liées aux individus, à leurs émotions, à leur imprévisibilité -, ces questions nous les explorons au fil de nos expériences, rencontres et échanges…

Nous leur avons même dédié une émission de radio (lien vers podcast en cours de création), c’est dire à quel point c’est une thématique qui nous anime !

Si bien qu’aujourd’hui, si nous n’avons pas de formule miracle à vous révéler (car, attention spoiler : ça n’existe pas), nous avons néanmoins quelques idées à vous proposer, tirées de notre vécu, de nos expérimentations, ou encore d’échanges passionnants au sein de l’équipe et avec des expert.e.s du sujet.

Changer l’entreprise avec ses collaborateurs

À en croire les grandes théories managériales, les collaborateurs, face au changement insufflé par la direction, se divisent en trois catégories :

  • les actifs, ceux qui y croient, participent et encouragent le changement ;
  • les passifs, ceux qui regardent les choses se faire, mais s’y adaptent sans rechigner ;
  • et enfin les réfractaires, ceux qui ne croient pas à la transformation proposée, et par conséquent y résistent activement.

À se demander si certains collaborateurs ne seraient pas naturellement prédisposés à bien vivre le changement, et d’autres à le freiner… Mais détrompez-vous. Les résistances sont tout aussi bonnes à prendre que les plus grandes expressions d’engouement. Autrement dit, on ne peut que gagner à comprendre ce qui fait que Paul est aussi enjoué à la veille de cette fusion de services, tandis que Jérôme freine des quatre fers. Car les « réfractaires » ont souvent de bonnes raisons de l’être.

La mauvaise compréhension du projet de changement peut être une première raison de résistance. Car, comme le dit très bien Marion Lambert, responsable accompagnement des transitions et développement RH à la Carsat des Pays de la Loire, dans le micro de notre émission RADIOSCOPIC : « Le sens est central à toute démarche de changement. Car les gens n’ont pas envie qu’on les change : ils veulent être acteurs de quelque chose qui leur parle ». L’être humain adhère difficilement à quelque chose qu’il ne comprend pas. Or, ce sens, il doit provenir de la direction. La pédagogie avec laquelle les dirigeants communiquent leur projet à l’ensemble des collaborateurs est un premier paramètre crucial. La communication interne est clé dans la conduite du changement.

Car même si on prône un changement participatif, cela n’empêche qu’il demeure, la majeure partie du temps, un phénomène descendant, tout du moins dans son initiation.

C’est ce que l’on constate au quotidien, dans nos missions d’accompagnement et de conseil en stratégie, communication et innovation. Notre intervention extérieure, au contact de l’équipe dirigeante, lui permet de prendre du recul sur l’activité, l’organisation, le fonctionnement de la structure, et de les remettre en perspective du projet d’entreprise.

Nous aidons nos clients à « lever la tête du guidon », à y voir plus clair dans ce qui fonctionne bien, ce qui fonctionne moins bien, ce qu’il reste à inventer… Nos prestations en conseil stratégique, du fait de cette prise de recul et parfois du questionnement du projet d’entreprise, initient presque systématiquement le changement, sous une forme ou sous une autre. C’est ensuite la manière dont cette volonté d’avancer est incarnée par la direction, partagée avec le management intermédiaire et communiquée aux équipes qui conditionne – entre autres – sa réussite, d’un point de vue opérationnel et, surtout, humain. Car l’heure est au bien-être dans l’entreprise, à la fidélisation et à l’attraction des talents… gare aux fausses routes !

Mais les réfractaires au changement peuvent aussi émettre des résistances tout simplement parce que le projet entrepris ne leur semble pas pertinent. Qu’ils n’y voient pas de valeur ajoutée, y trouvent moins d’avantages que d’inconvénients, et donc, on y revient, n’y perçoivent pas de sens. Comme toute critique constructive, ces résistances au changement doivent être reçues avec bienveillance et intérêt. Elles peuvent permettre l’amélioration du projet, la prise en compte de paramètres jusque-là non considérés, la redéfinition des modalités de mise en œuvre… Mais encore faut-il permettre aux collaborateurs de les exprimer, ces critiques ! Un climat de confiance et d’écoute, où le dialogue est ouvert et le jugement mis de côté, est donc indispensable. Le changement est affaire de relations humaines. Plus encore que de prêter une oreille attentive aux réactions et aux critiques, c’est selon nous une implication amont des équipes qui permet d’installer cette confiance.

Ouvrir la conversation, questionner l’ensemble des parties prenantes, laisser la place à l’initiative de chacun… bref, permettre aux collaborateurs d’être acteurs dans la démarche, et pas seulement de réagir à des décisions imposées. Le changement de se décrète pas, il se vit !

Pas si simple, nous direz-vous ? En effet, il y a ceux qui n’ont pas envie de s’impliquer, parce que, après tout, « ce ne sont pas eux qui sont payés pour décider ici »… Et puis « le participatif, dans un groupe de 2000 collaborateurs, vous n’y pensez pas !? »… « Laisser s’exprimer les collaborateurs ? Ça va être ingérable. »

À chaque entreprise, à chaque projet, ses difficultés et ses solutions. Quant aux équipes plus fournies des grands groupes et autres multinationales, elles pourront tout autant être mises à contribution que celles d’une PME.

Après tout, les changements qui impactent la totalité de l’entreprise sont finalement assez rares, et même lorsque c’est le cas, des astuces peuvent être mises en œuvre pour s’assurer de l’implication de toutes les parties prenantes. Des groupes de travail dont la composition peut se baser sur le volontariat, ou même sur le hasard, sont un exemple parmi d’autres de dispositif permettant d’intégrer à la réflexion des « représentants » de chacune des parties prenantes. Et les disciplines du design et de l’innovation collaborative offrent une très vaste palette d’outils, que l’on n’en finit pas de réinventer ! Alors oui, ça peut prendre davantage de temps.

Oui, il faut tester, parfois rater, pour mieux réessayer. Quitte à faire appel à une aide extérieure pour vous accompagner. Mais, à terme, cette implication, quand elle est bien menée, ne peut qu’être bénéfique au changement mis en œuvre, et donc impacter positivement et durablement les équipes, les dirigeants, les clients, les partenaires, et le système de l’entreprise dans sa globalité.

Envie d’écouter ou de réécouter l’émission c’est par ici 👉 « RADIOSCOPIC – Le changement en entreprise : quelle place pour les collaborateurs ? » ?

Cet article a été rédigé par :

Juline Merlet, cheffe de projet communication

Gildas Maquaire, directeur conseil et création

Anne Giraud, designer et conseil en innovation collaborative

Source :

 « Le courage de transformer », Étude EY sur la transformation des entreprises et des organisations publiques, février 2019.

« Baromètre 2016 sur l’accompagnement humain du changement », IFOP et Empreinte humain, mai 2016.